Retrouvons quelques informations occultées par la mise en scène médiatique des provocations antimusulmanes et de l’agitation salafiste : grève à la Banque de France contre le plan de restructuration ; conflit entre les syndicats et la direction de Sanofi qui prépare elle aussi un plan de restructuration ; grève des salariés d’Ikea Paris-Nord qui protestent contre les sous-effectifs et les bas salaires ; étude du Crédoc annonçant une baisse du pouvoir d’achat par ménage de 1,2{9ef37f79404ed75b38bb3fa19d867f5810a6e7939b0d429d6d385a097373e163} pour 2012 et 2013, qui fait suite aux baisses de 2010 et 2011 (1). Cela signifie que la crise et les mesures d’austérité déjà prises par les sarkozystes aggravent mois après mois la situation dans notre pays.

Nous sommes sur la voie d’une récession grave. Nous sommes confrontés au risque d’une dépression. Pourquoi le président de la République ne prend-t-il pas la décision salvatrice de sortie de l’euro ? Pourquoi le gouvernement s’obstine-t-ildans une erreur manifeste ? Il était intéressant d’écouter le 21 septembre les réponses d’Arnaud Montebourg, invité par Mediapart à expliquer la politique gouvernementale et le rôle joué par son ministère. Les réponses de celui qui fit campagne sur le thème de la démondialisation ont été habiles mais fondamentalement décevantes.

L’habileté tient dans le discours volontariste : il faut « organiser l’effort collectif quand une entreprise est en difficulté » ; « nous pratiquons la stratégie allemande du chômage partiel » ; « notre travail est de secourir les outils industriels ce qui suppose parfois des sacrifices »… « Faire du remède rapide pour éviter l’aggravation de la situation. Quand la croissance sera là, nous aurons encore des entreprises  [qui auront peut-être maigri] »… Plus largement, Arnaud Montebourg s’est prononcé de manière un peu confuse pour une « révolution industrielle décentralisée » qui serait une « alliance entre le redressement économique et le redressement créatif au contraire du colbertisme » mais ce serait tout de même un « colbertisme participatif » car « on ne refera pas une industrie centralisée » !

C’est une manière d’enterrer, sous des couronnes de fleurs, tout projet de nationalisation des secteurs-clés et le principe de la planification indicative. Le socialisme n’est plus socialiste, ce n’est pas une révélation mais Arnaud Montebourg nous avait laissé espérer, pendant sa campagne pour les primaires, qu’il pourrait retrouver le sens de sa tradition politique. Tel n’est pas le cas. Après d’autres, le ministre du Redressement productif fait de l’infirmerie de campagne tout en nous affirmant que l’industrie nationale sera sauvegardée au prix de régimes amincissants. Illusion !

Illusion funeste. On ne construit pas une maison sous les bombes. On ne met pas en place un dispositif économique en vue d’une révolution industrielle en pleine offensive ennemie. On confond cure d’amaigrissement et pacte de famine. Arnaud Montebourg semble avoir oublié que le libre échange était et demeure la première cause de la crise. Il semble avoir oublié que l’Allemagne est d’autant moins un modèle qu’elle ne joue pas franc jeu dans la concurrence industrielle. Et il ne veut pas admettre que le Pacte budgétaire est un instrument structurel de régression économique et sociale qui contredit ses belles paroles sur le « redressement durable » : quant au TSCG, nous n’avons eu droit qu’à la reprise de la propagande gouvernementale.

Somme toute, Arnaud Montebourg se retrouve dans une impasse, aux côtés de ses collègues du gouvernement. S’il se contente, avec eux, d’aménager l’ultralibéralisme sur quelques points mineurs en attendant les interventions de la Banque centrale européenne, l’ardent combattant de l’hiver dernier sera vite déconsidéré et rejeté. Les investissements continueront d’être découragés par la baisse du pouvoir d’achat et la croissance ne sera d’autant moins au rendez-vous que plusieurs de nos voisins s’enfoncent dans la crise économique et sociale. La reprise ne viendra pas de la Chine et de l’Inde, qui vont entrer en récession. La zone euro continuera d’être pour nous le piège qui nous asservit et nous mutile (2).

Nous sommes dans l’impasse, menés par des aveugles volontaires.

***

(1)Cf. l’article de Laurent Mauduit sur le site Mediapart : http://www.mediapart.fr/journal/economie/200912/la-france-s-enfonce-dans-une-crise-sociale-majeure

(2)Cf. le blog de Jacques Sapir : http://russeurope.hypotheses.org/

Editorial du numéro 1019 de « Royaliste » – 2012

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4 Commentaires

  1. cording

    La solidarité de parti a été la plus forte sur ces belles et justes analyses, propositions, idées, toute l’aile gauche du PS ne fera au mieux que s’abstenir lors du vote parlementaire sur le TSCG. Pour le PS, une europe libérale est préférable à pas d’europe du tout voire à ouvrir la boîte de Pandore qui consisterait à remettre en question l’europe.

  2. cording

    J’ajoute que cette impasse Montebourg était bien prévisible dès lors qu’il s’est mis au service d’Hollande pendant la campagne électorale et surtout quand il est devenu ministre du « Redressemnt productif » qui dans le cadre d’une europe libre-échangiste ne peut être que le ministre des plans sociaux.

  3. Lacquemant

    Bonjour,
    voici , ce qui circule sur le net …Pointé du doigt  » encore  » …le  » consommateur  » , c’est à dire le  » petit peuple  » et pas remettre en cause le système

    Montebourg en appel à la responsabilité des consommateurs : « Je dis aux Français qui achètent des Hyundai et des Kia qu’ils participent quand même d’une certaine manière à une forme de dureté sociale (…). La responsabilité du consommateur est de pousser, quand il va à la porte de son concessionnaire, et de regarder ce qu’il y a derrière les vitres de la voiture »
    http://www.lejdd.fr/Economie/Actualite/Montebourg-en-guerre-contre-Hyundai-560924

  4. vaclav olmac

    Le consommateur se trouve sur un marché et regarde le rapport qualité/prix. C’est tout. Pourquoi serait-il dur envers lui-même pour acheter quelque chose de cher, de moins bonne qualité et qu’il n’aime pas ?

    Tout ceci montre que Montebourg est un personnage dérisoire comme sa politique et son ministère.

    Le vrai guide du redressement productif c’est le marché.