Déclaration du Comité directeur de la Nouvelle Action royaliste sur la loi Taubira – 10 février 2013

Fév 10, 2013 | Chronique politique, la lutte des classes, Res Publica | 3 commentaires

Le Comité directeur de la Nouvelle Action royaliste se doit de publier ses observations sur le projet autorisant le mariage entre personnes de même sexe, sans référence à une « doctrine » de la famille qu’il n’a jamais formulée et dans le respect des principes de la République – tout particulièrement le principe de laïcité.

Il y a lieu de constater que le mariage est devenu une institution fragile. Dans l’ordre juridique, le divorce peut s’obtenir à la demande et la filiation est devenue complexe, depuis que les enfants légitimes ou non-légitimes sont à égalité, depuis que l’enfant peut exercer une action en recherche de paternité. Du point de vue sociologique, des familles recomposées de diverses manières existent au détriment du modèle de la famille nucléaire qui est invoqué dans la plupart des débats.

Le gouvernement a estimé nécessaire de présenter un projet de loi ouvrant le mariage aux couples de personnes de même sexe et leur donnant accès à l’adoption. Du point de vue juridique, il est certain que le mariage n’a jamais été défini et il était pertinent de poser la question de sa définition au Conseil constitutionnel dans la mesure où celui-ci pouvait découvrir cette définition dans la tradition juridique française. Le Conseil constitutionnel a cependant jugé qu’il ne lui appartenait pas de substituer son appréciation à celle du législateur, dont la compétence en matière de régimes matrimoniaux est reconnue par l’article 34 de la Constitution.Le recours au référendum est par ailleurs exclu car le mariage ne relève pas de la politique sociale mais du droit civil.

Les partisans de la loi présentée par Madame Taubira étant majoritaires dans les deux Assemblées, le texte sera adopté. Cependant, les nouvelles dispositions juridiques ne feront pas disparaître les oppositions, religieuses ou laïques, qui se situent dans l’ordre de la symbolique politique. Il y a conflit sur les droits – droit de l’enfant à avoir un père et une mère, droit des personnes de même sexe au mariage et à l’adoption. Il y a conflit sur les représentations de la famille et sur sa définition. Il y a conflit sur les concepts d’égalité et de différence selon des considérations, également respectables, qui touchent parfois à l’intime.

Le président de la République et le gouvernement ont abusivement invoqué un mandat qui leur aurait été confié par les électeurs, alors que « tout mandat impératif est nul ». Assurés de leur victoire, les partisans de la loi Taubira devraient être attentifs aux conséquences de la bataille qu’ils ont déclenchée : ils n’ont pas vaincu les seules « forces réactionnaires » mais provoqué un trouble profond dans une société qu’on ne cesse de déclarer « en perte de repères ». Ajouté à la violence de la crise économique, le désarroi culturel dans lequel se trouvent de nombreux Français va s’accroître : on a compté le nombre des manifestants hostiles à la loi Taubira, on a oublié de s’interroger sur les motifs des citoyens qui restaient silencieux et qui n’en étaient pas moins stupéfaits ou scandalisés. Le gouvernement devrait s’inquiéter des violences soudaines, individuelles ou collectives, qui pourraient éclater en écho proche ou lointain au conflit sur le mariage et la filiation. Il est plus facile de trouver ou de retrouver un équilibre personnel lorsqu’on bénéficie des privilèges du pouvoir, du savoir supposé et de l’argent que lorsqu’on appartient aux classes défavorisées et humiliées.

Le gouvernement devrait aussi mettre sans tarder une limite claire aux droits nouveaux qui sont revendiqués par certains. L’égalité ne peut effacer toutes les différences. Le Comité directeur de la Nouvelle Action royaliste, qui ne saurait contester l’Assistance médicale à la procréation en cas d’infertilité pathologique, exprime son opposition résolue à la Procréation médicalement assistée -tant pour les couples homosexuels que pour les hétérosexuels – et à la Gestation pour autrui. La vocation des médecins est de soigner les malades, non de devenir des techniciens de la reproduction répondant aux envies de clients. Et toute forme de location de corps, en fonction de la demande sur un marché, est à proscrire absolument.

Le Comité directeur de

La Nouvelle Action royaliste

Déclaration publiée dans le numéro 1029 de « Royaliste » – février 2013

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3 Commentaires

  1. Jacques Payen

    La justesse de cette analyse, son équilibre, la fermeté du propos me frappent, en comparaison de la plupart.
    Au delà de la question du mariage entre personnes du même sexe, nous devrions surtout réfléchir à l’évolution de la fonction du droit dans les sociétés complexes.Doit-il devenir une machine à satisfaire à l’infini les nouveaux désirs ?
    Cesser d’être le juste régulateur des contractions internes, des conflits d’intérêts dans nos sociétés ?

    Le procédé assez politicien de la mise en scène de cette réforme « sociétale » et le tour excessivement polémiste des argumentaires,dans tous les camps, ont contaminé la réflexion et le débat. Dommage !

  2. OLIVIER COMTE

    La gestation pour autrui est évidemment une abomination
    morale, fondée sur la faiblesse morale ou économique.

    La déclaration du comité directeur de la NAR a le grand mérite,pour un vieux républicain, de rappeler la dissolution constante des principes de la famille. Si les opposants à cette loi fondent leur argumentation, principalement,sur les enfants, il serait bon d’ insister sur l’ obligation morale qui lie également les enfants aux parents.
    L’ égoïsme qui détruit lentement le mariage est renforcé par
    les difficultés économiques et l’ éloignement géographique
    qui sapent les devoirs familiaux.

    Il est heureux que le Conseil Constitutionnel, dont les compétences et l’ autorité juridique tendent vers l’invisibilité,
    ne prête pas une autorité imaginaire à la résolution du problème.
    Si le mandat impératif est constitutionnellement nul, il s’ agit évidemment du cas d’un parti qui voudrait imposer sa volonté à ses élus, non d ‘élus qui veulent répondre justement à la volonté des électeurs. Je ne connais pas d’ application du mandat impératif nul pour le président de la république.
    Si le camp socialiste a trop parlé de réforme de la société,
    le camp adverse s’est éloigné de ses principes en favorisant une haine anti-homosexuelle, très éloignée des enseignements chrétiens, cherchant, comme pour l’ affaire
    de l’ école « unifiée », une revanche des élections.

    Je suis heureux de voir la NAR développer ses principes, non
    des passions.
    Sur le fonds, il ne faut pas oublier que le mariage homosexuel liera des personnes par des liens souhaitables de responsabilité et d’ engagement, liens qui n’ont jamais existé dans le PACS qui est une monstruosité juridique aux conséquences morales incertaines.

  3. de Langle Henri

    Cher Bertrand
    je ne m’explique pas les réactions des écologistes sur ce sujet,
    N’est ce pas sur ce plan anthropologique que l’on peut au moins trouver des arguments pour séparer les unions homo et hétéro les uns le pacs les autres le mariage pour éviter l’indifférenciation et garder les spécificités naturelles. ce que le le PS avait promis (déclration de Mme Guigou lors du Pacs), pour l’écologie trop politisée faute de représentation équilibrée tout le monde devrait pouvoir être écologiste de gauche ou de droite : environnement et droit naturel ; quant à moi je pense que d’avoir éliminé le facteur chrétien parmi d’autres dans l’identité francaise est une erreur !

    Henri de Langle